Théories et pratiques

Préambule : Aviez-vous déjà visionné cette capsule? Elle représente de plus en plus le climat que je souhaite instaurer dans mes formations. Je la présente de plus en plus souvent aux enseignants que j’accompagne en espérant semer chez eux une nouvelle façon de faire.


Dans leur synthèse, Ménard et St-Pierre (2014) vont à l’essentiel en énonçant les points à retenir pour les différentes théories de l’apprentissage. Leurs indications serviront pour la trame de fond de ma réflexion.

Les auteures soulèvent quelques aspects sur lesquels se pencher si on opte pour le constructivisme. Dans ma pratique, je dois notamment être ouverte aux conceptions préalables des enseignants afin de les soutenir dans l’évolution de leur compétence TIC. Savent-ils ce qu’est l’infonuagique nécessaire à l’utilisation de nouveaux outils collaboratifs ? Avec quelles pratiques de gestion de classe sont-ils à l’aide et sont-elles compatibles avec une intégration des TIC ? Comment les amener à concevoir ce qu’ils ne perçoivent pas encore être une valeur ajoutée ? Comment s’assurer que chaque membre d’un groupe hétérogène reparte avec les outils dont ils ont besoin ? C’est le genre de questionnement qui me préoccupe lorsque je conçois une formation à leur intention. De moins en moins, je pense à ce que je vais leur dire. De plus en plus, je pense à ce que je vais leur faire faire. Une pédagogie active et interactive permet, selon le constructivisme, une quête vers les connaissances et une adaptation aux situations nouvelles.

Quant aux grandes idées tirées du constructivisme mentionnées par Ménard et St-Pierre (2014), je retiens une élaboration soigneuse des situations d’enseignement. En effet, lors de la conception d’une formation, je tente d’organiser les contenus en une séquence « digeste » pour les enseignants. Je tente d’imager et de vulgariser les liens entre chaque partie. J’ai réalisé depuis un certain temps que le diaporama impose une structure séquentielle qui me semble de moins en moins convenir à mon objet d’apprentissage, l’intégration des technologies, lequel explose rapidement comme une toile d’araignée. Je suis toujours en quête du meilleur support pour organiser les contenus, à consulter avant, sur place, ou après une formation. Une organisation modulable des contenus m’apparaît nettement préférable, ainsi on peut passer de l’un à l’autre selon les besoins d’un groupe. Pour le formateur, ça demande une bonne flexibilité et une préparation assez exhaustive (quitte à tout écrire ce qu’on aimerait dire et à ne pas en glisser un mot si les participants ne sont pas prêts !). Pour les participants, ça exige une identification claire de leurs besoins et une participation active (pas de place à la petite gêne !). Ça en déstabilise certains qui aiment être « nourris », mais je crois en cette formule. Dans mes formations, il y a toujours de la place à l’expression des questions et commentaires (il n’y a jamais de questions bêtes) de même que beaucoup de temps d’exploration et d’organisation pendant lesquels je circule pour répondre aux besoins.

Quant au cognitivisme, je tente de voir en quoi je fais une place à la mémoire, aux types de connaissances et aux stratégies. Je n’identifie cependant pas beaucoup d’éléments qui ont de tels échos dans ma pratique. Les auteures évoquent, entre autres, les connaissances procédurales, soit la mémorisation des étapes pour en arriver à une automatisation. Or, je réalise, en tant que conseillère pédagogique, que je fuis la plupart des sujets de formation qui ont pour but l’enseignement fonctionnel d’une application ou d’un logiciel. Ce qui m’intéresse, c’est d’accompagner les enseignants à trouver la stratégie qui fonctionne pour eux. À mon avis, l’outil n’est qu’un prétexte pour y arriver. Remettre technologie entre les mains des élèves est prioritaire pour moi. Pointer ce qui se passe sous la 2e fonction du 4e menu d’un logiciel commercial à 3 chiffres ne correspond pas à mes valeurs.

Cependant, j’ai identifié certains éléments qui me préoccupent du côté de l’humanisme (qui l’eût cru !). En effet, la motivation à apprendre et le transfert des apprentissages évoqués par Ménard et St-Pierre (2014) sont pertinents dans mon domaine. Un tableau numérique interactif entré dans une classe où l’enseignant n’en voulait pas alors que l’autre l’attend depuis des années ; une nouvelle technologie imposée qui sert davantage les intérêts administratifs, mais qu’on espère qu’elle sera maitrisée rapidement par tous ; des outils d’aides technologiques qui exigent une préparation différente et un enseignement différencié ; ou alors une formation obligatoire une journée où les enseignants rêvaient de planifier font une grande différence sur l’état d’esprit des enseignants. Jongler avec ces éléments émotifs fait partie des enjeux actuels. Quant au transfert des apprentissages, il n’est pas toujours aisé. Même le meilleur des outils offrant les possibilités pédagogiques les plus créatives est parfois reçu avec un « oui, mais moi dans mon milieu… ». Lorsque ça se produit, j’utilise la force du groupe pour résumer et questionner. « On dit ici que… Comment feriez-vous pour… ? ». Je vous confie néanmoins que cette stratégie ne fait pas toujours de miracles.

Quant au connectivisme (une belle découverte pour moi ces dernières semaines), je réalise que j’aurais avantage à y emprunter quelques éléments pour compléter mon approche. En effet, si Siemens (2005) mentionne que l’utilisation d’outils façonne notre manière d’apprendre ; que certaines opérations cognitives peuvent maintenant être prises en charge par la technologie ; que de savoir où trouver l’information est désormais plus important que le savoir lui-même (Siemens, 2005), j’aurais intérêt à m’en inspirer puisque cela correspond tout à fait à mon domaine !

Je vous partage un modèle qui circule depuis quelques années dans mon réseau : le modèle des 4-O (une bonification du modèle At the board, on the desk, in the head (Miller (2007)). À l’époque, je n’avais pas trouvé le petit oumph dont j’avais besoin pour m’en inspirer réellement. Avec mes récentes lectures, je crois que l’ai !

Les 4 -O décrivent des espaces pédagogiques complémentaires pour faciliter les apprentissages : Tabl-O (ce qui se passe en grand groupe autour du tableau blanc interactif), Bur-O (ce qui se passe comme activité à la table de l’élève), Cerv-O (ce qui se passe dans la tête de l’élève, c’est-à-dire les stratégies cognitives qu’il met en place) et Rés-O (ce qui se passe dans les interactions, en ligne ou pas). À bien y réfléchir, ça collige, certains éléments du béhaviorisme (tableau et bureau), du constructivisme et du cognitivisme (bureau et cerveau) de même que du sociocontructivisme et du connectivisme (réseau). Je place une synthèse visuelle (RÉCIT MST, 2012) pour faciliter la compréhension du modèle (il y manque cependant la dimension réseau que j’entends bien mieux intégrer dans mon approche dans un futur pas si lointain !).



Connaissez-vous ce modèle ?

***RÉFÉRENCES

Ménard, L. et St-Pierre, L. (2014). Paradigmes et théories qui guident l’action. Dans Se former en pédagogie de l’enseignement supérieur (pp.17-34). Montréal : Collection PERFORMA AQPC.

Miller, D. J. (2007). At the board, on the desk, in the head: Using the interactive whiteboard to enhance mathematics teaching. Récupéré à: https://www.ncetm.org.uk/mathemapedia/ BoardDeskHead 

Siemmens, G. (2005). Connectivism:A Learning Theory for the Digital Age. Repéré à : http://www.elearnspace.org/Articles/connectivism.htm 

Teaching Channel. [Susan Yim] (n.d.). Ask 3 Then Me. [vidéo]. Récupéré de https://www.teachingchannel.org/videos/ask-3-then-me 

Service national du RÉCIT à l’éducation préscolaire (n.d.). Modèle 3-O, TablO, BurO, CervO et modèle 4-O, TablO, BurO, CervO et RésO. Repéré à : http://recitpresco.qc.ca/node/1345 

Service national du RÉCIT MST (2012). 3-O : TablO - BurO – CervO. Des synthèses. Repéré à : http://recitmst.qc.ca/p/Explications3O

Commentaires

  1. C'est un excellent billet, c'est-à-dire que les liens entre les référents théoriques et la pratique sont très bien articulés. La question d'aborder le transfert est aussi très pertinente.

    Par ailleurs, je cite dans votre blogue : "J’ai réalisé depuis un certain temps que le diaporama impose une structure séquentielle qui me semble de moins en moins convenir à mon objet d’apprentissage, l’intégration des technologies, lequel explose rapidement comme une toile d’araignée." Le design d'une formation doit faire une place à des itérations en cours de route afin de mieux cibler des apprentissages sur ce qu'ils ne savent pas plutôt que d'insister sur ce qu'ils savent. Évident, mais dans le feu de l'action, ça reste difficile à faire. Également, les apprenants doivent être prêts à ces changements.

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